Depuis la fin des années 1980, des artistes chinois développent un art corporel fait de souffrance et d’auto-maltraitance, a priori proches de certaines performances occidentales et pourtant bien différentes dans leurs intentions. La différence tient à la culture chinoise – entre les pensées issues du confucianisme et du taoïsme –, à la tradition du lettré – créateur garant de l’éthique –, mais aussi aux récentes évolutions de la société. Le corps de l’artiste est ici un corps social qui reflète les paradoxes de l’évolution politique récente du pays où la tension se fait de plus en plus forte entre les dogmes communistes et l’ultra-libéralisme de l’économie. Mais cet art prend également appui sur la Révolution culturelle, sombre époque de l’histoire du pays où des milliers d’intellectuels furent condamnés à l’humiliation et dont la Chine se garde bien de commémorer l’anniversaire il y a exactement cinquante ans.
On se souvient de la formule de Mao : « L’art au service du peuple ». C’était un art « réaliste socialiste » mis au service de la propagande maoïste bien loin des intérêts des masses. Tout juste après la Révolution culturelle, la liberté dans l’art, longtemps réprimée en Chine, est réclamée, en particulier par le groupe artistique et littéraire Les…