Dans la capitale britannique, la culture semble bien portante. Le secteur contribue chaque année à hauteur de près de 50 milliards d’euros € (42 milliards de livres sterling) à l’économie de la ville. La culture représente un emploi sur six et les emplois créatifs (réputés pour être difficilement automatisables) augmentent quatre fois plus vite que la moyenne.
Au-delà de ce tableau radieux, le secteur culturel britannique souffre, frappé notamment par les prix de l’immobilier et ses envolées successives. Ainsi, pour la première fois depuis 50 ans, il y a plus de Londoniens qui quittent la capitale que de nouveaux résidents. Les artistes ne sont pas épargnés et se retrouvent peu à peu « expulsés ». Voici la sombre analyse dressée par l’organisation londonienne SPACE dans son étude intitulée « Artists in the City : SPACE in ’68 and beyond ».
Fondée en 1968, SPACE a pour vocation de mettre à la disposition d’artistes des espaces de travail à des prix modérés. SPACE gère aujourd’hui 19 sites à travers la ville et fournit des ateliers à plus de 700 artistes, pour une superficie totale de plus de 25 000 m2.
L’initiative prend forme il y a 50 ans quand ses deux fondateurs, Bridget Riley et Peter Sedgley, tous deux artistes de renom, ouvrent un premier espace dans un ancien entrepôt d’ivoire de St Katharine Docks, au bord de la Tamise. Ils aménagent le lieu et y louent alors les premiers ateliers d’artistes pour l’équivalent de 500 € par an. Dans les années qui suivent, plusieurs bâtiments seront ainsi convertis.
Si le concept de réaménagement de friches en ateliers d’artistes n’était alors pas totalement nouveau –les fondateurs ont déclaré avoir été inspirés par New York –, SPACE a été le premier complexe d’ateliers d’artistes légalement institué à puiser dans la profusion d’entrepôts industriels désaffectés. C’est de ce modèle qu’est né P.S.1, structure de production et d’exposition new-yorkaise fondée en 1976 dans les anciens locaux d’une public school (qui lui vaut son acronyme) ou encore le Künstlerhaus Bethanien à Berlin.
L’organisation s’appuie aujourd’hui sur un vaste programme de partenariats avec le secteur immobilier, ainsi qu’un plan de soutien aux artistes sous la forme de bourses et de résidences. Pourtant Anna Harding, directrice actuelle de SPACE, alerte : « Les ressources vitales, comme les ateliers d’artistes et les lieux alternatifs, ne doivent jamais être réputés acquises. Et sans elles, la place de Londres parmi les villes créatives est menacée. »
spacestudios.org.uk/artists-in-the-city