Le dossier : « Art, poésie et justice internationale »
Depuis 2014, Julien Seroussi, chercheur en sciences sociales, et Franck Leibovici, artiste et poète, mènent une expérience inédite. Leur projet, law intensity conflicts, est né des observations de Julien Seroussi en tant qu’assistant juridique au procès Katanga/Ngudjolo à la Cour Pénale Internationale (CPI) de La Haye, entre 2009 et 2014. Cette expérimentation, qu’ils nomment “œuvre-enquête”, utilise les outils de l’art, de la poésie documentale et des sciences sociales pour analyser et tenter de modifier les pratiques ordinaires de saisie des matériaux en cours à la CPI. Les outils prennent tour à tour la forme d’installations, de livres, d’ateliers de travail ou encore d’interventions radiophoniques. Ils visent à être utilisés aussi bien par les professionnels de la Cour, que par les communautés affectées et les chercheurs – autant de publics concernés par ces procès mais isolés les uns des autres. Comment la société civile peut-elle prendre part à la justice internationale, sous de nouvelles modalités, pour en faire une plateforme d’invention culturelle et non plus uniquement une institution technique réservée aux experts ?
Le texte, fruit de quatre ans de conversation entre Virginie Bobin, Franck Leibovici et Julien Seroussi, prend la forme d’un feuilleton publié en plusieurs épisodes en grande partie rédigés à l’automne 2018, sauf pour quelques paragraphes écrits au printemps 2019. Le texte couvre les étapes de law intensity conflicts réalisées entre 2014 et 2018.
Biographies :
Franck leibovici (poète, artiste).
a tenté de rendre compte, sous la forme d’expositions, de performances et de publications, des conflits dits « de basse intensité » d’un point de vue documental (une poésie qui s’intéresse non plus au « texte » comme unité de sens, mais au « document », comme artefact produisant des effets) en usant de partitions graphiques et de systèmes de notation issus de la musique expérimentale, de la danse, de la linguistique – des documents poétiques (al dante, 2007), portraits chinois (al dante, 2007), low intensity conflicts, un mini-opéra pour non musiciens (ed. mf, 2019) ; a publié des correspondances de spams, des discours de 70h et des transcriptions de sex-tape amateur (lettres de jérusalem, 2012 ; filibuster, jeu de paume, 2013, de l'amour, éd. jean-boîte, 2019) ; a travaillé sur l’écologie de l’œuvre d’art – (des formes de vie) – une écologie des pratiques artistiques (les laboratoires d’aubervilliers / questions théoriques, 2012), des récits ordinaires (les presses du réel / villa arson, 2014), refresh ! / collecting live art (tate modern / koenig, 2012-2014), the training – an artwork for later / and after (biennale de venise, 2017) ; travaille actuellement, avec julien seroussi, à un nouveau cycle d’expositions et de publication (bogoro, eds. questions théoriques, 2016 ; muzungu, bunkier sztuki, cracovie ; ngbk, berlin, 2017 ; cité internationale des arts, paris, 2018 ; école nationale de la magistrature, bordeaux, 2019 ; cour pénale internationale, la haye, 2019-2020) autour de l’invention de la justice internationale contemporaine et du premier procès de la cour pénale internationale (cpi) de la haye.
Julien Seroussi
a commencé à s’intéresser à la justice pénale internationale dans le cadre de sa thèse sur les batailles juridiques et politiques autour de la définition de la compétence universelle des juges nationaux. Après une expérience à la Cour Pénale Internationale de 2009 à 2012, il poursuivit sa carrière au sein du Pôle «Crime contre l’humanité et Crimes et délits de guerre » du Tribunal de Grande Instance de Paris. À ce titre, il a participé à la Mission d’étude en France sur la recherche et l’enseignement des crimes de masse.